Le 23 décembre au soir, le Premier ministre Nikol Pachinian a lancé un défi aux anciens présidents arméniens. Il les a invités à un débat public retransmis en direct sur le processus de négociation concernant l’Artsakh.
Dans une vidéo publiée à ce sujet, Pachinian a déclaré :
« C’est un moment de vérité, car ce débat permettra au peuple de tirer des conclusions définitives et sans équivoque sur ce qui s’est réellement passé tout au long de l’histoire de la Troisième République. Qui est coupable, et de quoi ? Ce sera une occasion unique pour des acteurs informés de se confronter directement, face-à-face, en mettant fin à des débats à distance et d’en tirer des leçons pour l’avenir. Ce débat ne concerne pas seulement le passé, mais représente un tournant clé pour définir les stratégies à venir. »
Il a également ajouté :
« Ce débat dépasse la simple confrontation ; il s’agit d’interpréter et de comprendre notre propre histoire face à notre peuple.
Directement ou indirectement, les anciens présidents jusqu’à présent ont refusé de débattre. Cependant, je les invite à reconsidérer leur position, car une conclusion devra inévitablement être tirée. Je suis déterminé à aller jusqu’au bout. Sous quelle forme ? Cela reste à définir. J’opte pour une approche honnête, en me tenant face à face avec eux pour discuter. Je leur suggère d’accepter cette proposition, car sinon, le peuple en tirera les conclusions, et je m’engage à l’aider pour le faire. »
Les bureaux des anciens présidents Levon Ter-Petrossian, Robert Kotcharian et Serge Sarkissian ont répondu par des déclarations critiques à l’encontre de la proposition du Premier ministre.
1. Levon Ter-Petrossian
Arman Moussinian, porte-parole du premier président de l’Arménie, a ironisé :
« Il serait utile que Nikol Pachinian commence par débattre avec lui-même. Cela permettrait de démontrer que les deux parties du débat se mentent mutuellement. Ce duel imaginaire pourrait être élargi à de nombreuses autres questions, notamment celles d’ Amulsar, de la gestion étatique politisée, du favoritisme ou encore de l’effondrement de l’indépendance judiciaire. Le résultat sera, comme toujours, dénué de sens. »
2. Robert Kotcharian
Bagrat Mikoyan, chef du bureau du deuxième président, a critiqué la proposition :
« Depuis longtemps, le président Kotcharian ne prête plus attention aux diatribes colériques du Premier ministre. Quant au débat, il suppose des faits contradictoires. Or, la capitulation et la perte des territoires souverains de l’Artsakh relèvent de la seule responsabilité du Premier ministre actuel. Entre 2018 et 2024, une seule personne a exercé un pouvoir absolu en Arménie, et cette personne porte l’entière responsabilité des événements. Débattre avec quelqu’un qui se cache derrière des milliers de policiers est futile. »
3. Serge Sarkissian
Le bureau du troisième président a également rejeté l’idée :
« Débattre de l’évidence est inutile, d’autant que toute l’histoire des négociations a déjà été présentée avant et après la prise de pouvoir de Pachinian. Si le Premier ministre souhaite débattre, nous lui conseillons de s’adresser aux présidents des pays coprésidents du Groupe de Minsk (Russie, États-Unis et France) pour discuter des principes de résolution du conflit d’Artsakh définis entre 2009 et 2013. »
Le 24 décembre, Nikol Pachinian a publié une nouvelle déclaration, insistant sur la nécessité du débat. Il a exhorté les anciens présidents à présenter leurs arguments devant le peuple ou à se retirer de la vie politique :
« Si vous n’avez rien à dire, retournez à vos pensions ou à vos affaires judiciaires. Sinon, assumez vos responsabilités face au peuple. »
Dans une déclaration écrite, Ter-Petrossian a réagi directement :
« De quoi devrais-je débattre avec toi, alors que l’Artsakh arménien, fruit de milliers d’années d’histoire, a été anéanti par ton aventure ? Fais tout le bruit que tu veux, mais cette réalité est désormais un fait historique.
Nikol, si tu veux que le peuple connaisse la vérité sur les négociations autour du Karabakh, je t’invite à publier tous les plans de paix
proposés par les coprésidents du Groupe de Minsk, y compris celui de juin 2019, ainsi que les réponses officielles de la diplomatie arménienne. Ce serait un véritable débat basé sur des faits. Si tu refuses, tu auras confirmé une fois de plus que tu fuis la vérité et tes responsabilités historiques. » ■
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