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En cédant le Karabakh à l’Azerbaïdjan, la Russie a ouvert la porte à l’entrée en force des États-Unis et de l’Europe en Arménie

En réalisant avec succès sa médiation lors de la guerre de 44 jours de septembre 2020, tout en coopérant avec la Turquie, la Russie avait réussi un coup de maître : la réalisation du plan Lavrov, dont l’objectif principal était d’exclure l’Occident, en particulier les États-Unis et la France, les deux coprésidents du Groupe de Minsk de l’OSCE, du processus de règlement du conflit du Haut Karabakh.

En signant la déclaration de cessez-le-feu trilatérale, l’Azerbaïdjan victorieux a récompensé la Russie pour sa non-intervention en faveur des Arméniens et, en guise de remerciement, lui a permis d’envoyer des troupes de maintien de la paix en Artsakh et de devenir le garant du couloir de Latchine.

Et mettant à profit sa suprématie militaire sur l’Arménie, l’Azerbaïdjan a exigé de l’Arménie le couloir de Syunik contre le couloir de Latchine pour avoir un accès direct au Nakhitchevan. Ainsi pour forcer l’Arménie à lui céder ce couloir, Aliev a refusé de reconnaître l’intégrité territoriale de l’Arménie, a continuellement attaqué et occupé les territoires de l’Arménie souveraine, toujours avec la complicité de la Russie. Toutes les demandes d’assistance militaire de l’Arménie adressées à son allié la Russie et à l’OTSC sont restées sans réponse.

Dans ces conditions, il était essentiel pour l’Arménie de trouver de nouveaux alliés sur le terrain stratégique et de chercher de nouvelles sources d’approvisionnement en armes et munitions pour réorganiser et équiper son armée, car la Russie refusait même de lui fournir des munitions.

Après la guerre de 2020, l’alliance secrète entre l’Azerbaïdjan, la Russie et la Turquie a fonctionné et fonctionne encore au détriment de l’Arménie et de l’Artsakh, ce qui a conduit au siège complet de l’Artsakh pendant neuf mois, une politique de nettoyage ethnique, une mise à mort par la famine, puis à l’attaque surprise à grande échelle le 19 septembre, qui a contraint les habitants de l’Artsakh à l’exode vers l’Arménie.

La guerre en Ukraine a complètement modifié les rapports de force dans le Caucase du Sud. La Russie, soumise à l’embargo occidental, pour sa survie, est devenue de plus en plus dépendante de l’Azerbaïdjan et de la Turquie au point qu’elle ne pouvait plus assurer la libre circulation à travers le couloir de Latchine. Elle n’a pas pu arrêter les attaques de l’Azerbaïdjan contre l’Arménie et l’Artsakh. Elle s’est rendue complice de l’Azerbaïdjan pour forcer l’Arménie à céder le couloir de Syunik, comme contrepartie de la libre circulation sous commandement militaire russe dans le couloir de Latchine, qui était censé être contrôlé par les troupes de gardes-frontières russes.

C’est dans ces circonstances que l’Union européenne et les États-Unis ont organisé de nombreuses rencontres politiques entre le président azerbaïdjanais et le Premier ministre arménien à Washington et à Bruxelles en réponse aux carences de la Russie. La perte définitive de l’Artsakh, soumis à l’épuration éthnique, a encore souligné le support des États-Unis et de la France à l’Arménie. Samantha Power, directrice de l’Agence américaine pour le développement international (USAID), et Yuri Kim, secrétaire d’État adjointe par intérim pour les affaires européennes et eurasiennes, sont arrivées à Erevan le 25 septembre pour confirmer le soutien des États-Unis à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à la démocratie de l’Arménie, ainsi que pour  prendre des mesures afin de répondre aux besoins humanitaires découlant des récentes violences au Haut-Karabakh. La ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna, a également annoncé qu’elle ouvrirait un consulat à Syunik.

Et en Arménie, la colère populaire contre la Russie est sur le point de prendre de l’ampleur, même si l’opposition parlementaire tente de dissimuler la raison de la perte de l’Artsakh et de rejeter la faute sur le gouvernement actuel.

J. Tch. 

Éditorial