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Entre l’Arménie et l’Artsakh, les relations intergouvernementales sont endommagées

Il y a des lignes rouges à ne pas franchir. Surtout lorsqu’elles concernent les fondations de l’État, l’élection de l’autorité suprême du pays, comme c’est le cas de la présidence de la République d’Artsakh. Les forces politiques pro-russes d’Artsakh ont poussé Araïk Haroutunian, le président élu de l’Artsakh, à la démission et ont élu lors d’élections parlementaires hâtives Samuel Chahramanian, chef du Service de sécurité nationale de l’Artsakh, qui reste une personne politiquement inconnue. 

L’élection du nouveau président de l’Artsakh a été faite sous la pression russe. Le gouvernement arménien préférait maintenir Araïk Haroutunian comme président. De ce fait, le nouveau président n’a reçu aucune félicitation de la part des autorités arméniennes. Le Premier ministre Pachinian a répondu à la question en disant : «Qu’y a-t-il à féliciter ? Je lui souhaite cependant une bonne route, car son fardeau sera lourd. » Situation similaire à l’Assemblée nationale d’Arménie, le 11 septembre, la session a débuté sans aucun discours de félicitations adressé au nouveau président de l’Artsakh. 

Une chose était sûre : l’Azerbaïdjan et l’ensemble de la communauté internationale n’allaient pas accepter le résultat des nouvelles élections en Artsakh. C’est ainsi que cela s’est passé. L’UE, les États-Unis, la Turquie et d’autres pays ont officiellement annoncé le rejet des résultats des élections. Dans les conditions de crise que vit l’Artsakh, il est naturel que toute élection gouvernementale soit un prétexte pour l’Azerbaïdjan et la Turquie pour accuser les autorités arméniennes d’entraver les négociations de paix.

À partir de ce moment, les préparatifs d’une attaque à grande échelle de la part de l’Azerbaïdjan ont commencé. Le 9 septembre, le Premier ministre arménien a tenu cinq consultations téléphoniques avec des chefs d’États internationaux et des pays voisins, en commençant par la France, puis l’Allemagne, l’Iran et les États-Unis et la Géorgie, dont le but étaient d’empêcher le déclenchement d’une nouvelle guerre. Le président Erdogan, à son retour du sommet du G20, a annoncé qu’il négocierait le 11 septembre avec le Premier ministre arménien de l’irrecevabilité des élections présidentielles en Artsakh et de leurs conséquences.

L’avertissement du vice-ministre de la Défense Arman Sarkissian était clair : « Notre région est telle que le risque d’escalade de la guerre est toujours présent, mais nous, en tant qu’Etat, devons prendre des mesures pour que la situation ne dégénère pas, en général, en opérations militaires majeures. »

Parallèlement, sous la pression de la partie russe, le nouveau président de l’Artsakh a accepté le passage du camion d’aide humanitaire de la Croix-Rouge russe par la route Akna (Agdam)-Askeran-Stepanakart. Pour l’Azerbaïdjan, c’était une question de principe d’imposer le passage du premier fret de marchandises par la voie intérieure qu’il avait décidé. Et il a obtenu gain de cause, malgré la détermination des habitants de l’Artsakh qui ont veillé jour et nuit pour empêcher l’entrée de toute marchandise azérie en Artsakh via cette même route Akna (Agdam)-Askeran-Stepanakert. Sauf que finalement, avec l’insistance et l’assurance de l’armée russe et du gouvernement d’Artsakh que le contenu du fret humanitaire était des produits russes, et qu’en contrepartie la partie azérie autoriserait l’ouverture du couloir de Berdzor (Latchine), il a été possible pour le camion russe d’entrer en Artsakh. 

Cet accord azéro-russo-artsakhiote s’est ainsi déroulé malgré les appels répétés des grandes puissances occidentales à l’ouverture immédiate du couloir de Berdzor. En un mot, les Russes et les Azéris, main dans la main, ont réussi à contrer la pression internationale, avec la participation du président nouvellement élu de l’Artsakh, Samuel Chahramanian et des partis qui l’ont porté au pouvoir. Ces partis, qui, hier encore, nommaient la route Akna-Stepanakert « la route de mort » et avaient contraint l’ancien président Araïk Haroutunian à la démission. 

En réalité, la pression exercée par les mouvements des troupes azerbaïdjanaises la semaine dernière a eu son effet. Les autorités d’Artsakh ont cédé, sans aucune garantie que la partie azérie honorera sa promesse d’ouvrir le couloir de Berdzor ou qu’elle n’imposera pas de nouvelles conditions à son ouverture. La menace immédiate de guerre a été stoppée, mais les relations intergouvernementales entre l’Arménie et l’Artsakh ont été gravement endommagées.

J. Tch. 

Éditorial