La Turquie contaminée par l’Azerbaïdjan ?

Par Hagop Badalyan

La presse turque a récemment  fait état de la découverte de faits d’espionnage au profit de la France. Selon les médias turcs, un citoyen syrien se serait adressé au consulat général de France à Istanbul pour solliciter un droit de séjour en France. En échange de ce droit, il se serait vu imposer une condition : la mise en œuvre d’activités d’espionnage dans les domaines politique et militaire en Turquie. Ce qu’il aurait, selon les mêmes sources turques, accepté. Un scandale d’espionnage turco-français serait-il en préparation ?  Le précédent azerbaïdjanais aurait-il contaminé la Turquie ?

On se souviendra qu’il y a quelques semaines, l’Azerbaïdjan avait annoncé la découverte de faits d’espionnage au profit de la France et arrêté un citoyen français. Paris avait répondu par des révélations et l’expulsion de diplomates azerbaïdjanais. Aujourd’hui, il semblerait que la Turquie se soit unie à l’Azerbaïdjan. On remarquera que l’information est parue dans la presse turque après la visite d’Ilham Aliev en Turquie, juste après qu’il ait quitté Munich où il avait participé à la conférence internationale sur la sécurité.

Selon toute apparence, la Turquie et l'Azerbaïdjan ont décidé de renforcer la lutte anti-française sur le front caucasien. Comme Aliev l'avait annoncé à la veille de sa réélection anticipée, « ils [l’Azerbaïdjan et la Turquie] ne permettront pas le renforcement de la position de la France dans le Caucase ». Mais en tout état de cause, outre leurs propres problèmes, par leur position anti-française, Ankara et Bakou servent également les intérêts de la Grande-Bretagne dont la méfiance à l'égard de la France du fait d’un passif historique et politique ancien s’est à nouveau exprimée à plusieurs reprises dans le contexte de la crise actuelle et de confrontation stratégique mondiale.
Dans ce contexte, la rencontre à Munich du Premier ministre arménien avec Richard Moore, le chef des services secrets britanniques [MI 6, qui, comme on le sait, entretient des relations plutôt chaleureuses et amicales avec Erdogan et Aliev, mérite évidemment toute notre attention.
La Grande-Bretagne a annoncé son objectif stratégique de construire un corridor intermédiaire entre l’Asie centrale et la Turquie. La France a également annoncé avoir ce même objectif, mais elle semble privilégier un itinéraire légèrement différent qui contourne l'Azerbaïdjan et inclut la Chine et l'Inde, puis l'itinéraire Iran-Géorgie-Mer Noire. Dans le cas contraire, il ne fait aucun doute que si l’Azerbaïdjan était inclus, la France se retrouverait dans une situation de dépendance multiple.

 

Traduction : Sahak Sukiasyan

Éditorial