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Le processus de démarcation des frontières semé d’embûches

Le 26 avril, à Aghdam, lors de la cérémonie de clôture du centre russo-turc de surveillance du cessez-le-feu de la guerre de 44 jours, le commandant russe, le colonel-général Sergueï Istrakov, a félicité le travail fait en commun par le trio russo-turco-azéri, notant que « le ministre russe de la Défense et le chef d’état-major général voudraient exprimer leur gratitude aux militaires des trois pays qui ont accompli avec succès leur devoir dans le Caucase du Sud au nom de la paix », en ajoutant : « j’espère que nous continuerons à développer avec succès les relations inter-étatiques ». Il a également exprimé le souhait que les relations entre l’Azerbaïdjan et la Russie se développent sur la voie de l’amitié et du bon voisinage et que de grands projets économiques soient mis en œuvre dans divers domaines. Aucune allusion ne fut faite quant aux attaques systématiques, à l’encerclement et au nettoyage ethnique subis par la population d’Artsakh durant les trois années qui ont suivi le cessez-le-feu. La déclaration du commandant russe montre la victoire complète d’Aliev en Artsakh. Dans le même temps, cela confirme également le succès de la stratégie des pays occidentaux visant à faire retirer les troupes russes du Caucase du Sud. Chose faite en Haut-Karabakh.

Le processus de démarcation de la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan a commencé sous les menaces azéries. Déjà, 10 à 12 kilomètres de démarcation ont été réalisés dans les régions de Tavush et du Kazakh dans l’extrême nord-est de l’Arménie, malgré l’opposition de certains partis parlementaires et non-parlementaires ainsi que de l’Église apostolique arménienne. Le Premier ministre avait préparé le terrain depuis plus d’un mois, rencontrant la population des quatre villages concernés de la région de Tavush – Baghanis, Berkaber, Voskepar, Kirants –… pour la convaincre que la démarcation n’avait pas d’alternative.

Jusqu’à présent, aucune puissance étrangère n’a été en mesure d’arrêter ou de prévenir une attaque à la frontière par les Azéris. Comme aucune force n’a pu ou n’a voulu arrêter le blocus de l’Artsakh, le nettoyage ethnique, l’expulsion de 120 000 personnes de leurs terres ancestrales. Et de 2020 à aujourd’hui, aucune superpuissance, structure internationale externe, force ou tribunal n’a pu obliger Aliev à libérer les prisonniers de guerre et à mettre fin au recours à la force.

Face à cette situation contraignante, l’Arménie n’a d’autre choix que d’adhérer au droit international défendant l’acte fondateur de l’indépendance de l’Arménie : la Déclaration d’Almaty de 1991 qui rendait aux ex-républiques soviétiques leurs indépendances dans leurs frontières administratives respectives, lesquelles devenaient des frontières internationales. Elle espère que les superpuissances forceront Aliev à respecter ses obligations de bon voisinage. Tout en sachant que les alliés stratégiques Russie-Azerbaïdjan, tenteront toujours de créer des tensions frontalières, de provoquer une guerre pour affaiblir l’Arménie et la subordonner.

Effectivement, l’Occident – notamment les États-Unis, l’Europe, l’Allemagne, la France… – exerce une pression constante sur l’Azerbaïdjan pour qu’il poursuive le processus de démarcation. L’Azerbaïdjan dissimule ses intentions véritables, il cherche à éviter d’entamer un processus de délimitation des frontières basé sur la déclaration d’Almaty, bien qu’il se soit engagé auprès des États occidentaux pour régler son différend territorial avec l’Arménie par voie négociée. L’Occident fait semblant d’ignorer l’alliance de l’Azerbaïdjan avec la Russie. C’est ce qui a poussé Bayramov à déclarer : « la meilleure manière d’obtenir des résultats mutuellement acceptables avec Erevan passe par des négociations bilatérales ».

Cette situation inextricable a poussé le Premier ministre Nikol Pachinian à être proactif, afin de poursuivre coûte que coûte le processus de délimitation avec l’aide des pays occidentaux. À cette fin, il a annoncé sur les ondes publiques : « Surtout dans le cas de l’Azerbaïdjan, dans les circonstances que nous connaissons tous, nous devons mettre en œuvre le processus de délimitation des frontières le plus rapidement possible. Pourquoi ? Parce que tant que la démarcation n’est pas réalisée, il est possible qu’un conflit puisse surgir, et c’est la raison pour laquelle nous démarrons la démarcation à partir des endroits qui présentent le plus grand potentiel de conflit afin de maintenir une situation gérable au maximum ».

J. Tch. 

Éditorial