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PATRIMOINE – Une nouvelle manipulation de la propagande azerbaïdjanaise

Artsakhpress – Stepanakert le 30 novembre 2023

Le 11 novembre 2023, l’agence de presse officielle azerbaïdjanaise « Azertac » a publié un article détaillé consacré au monastère de Spidag Khatch situé dans le village de Vank du district occupé de Hadrout. Dès 2022, ce sanctuaire avait été pris pour cible par les Azéris qui avaient abattu la croix qui couronnait le tambour [kmpet] du sanctuaire et interrompu les travaux de restauration entrepris par les Arméniens. Le 2 novembre de la même année, le traditionnel « kit oudi » composé du même groupe d’activistes à la solde du pouvoir azerbaïdjanais se rendait au monastère pour un « flash-pèlerinage » largement commenté par les media du pays, promouvant la thèse du caractère « albanais » de l’édifice.

Citant l’historienne azerbaïdjanaise Mahabbat Pachaeyva, l’auteur de l’article précisait que pendant les « années d’occupation arménienne », la partie arménienne se serait approprié le « patrimoine culturel chrétien du Karabakh » et aurait tenté de le présenter comme arménien, citant comme exemple le monastère de Spidag Khatch. .

Cette thèse sans cesse répétée par la machine de propagande azerbaïdjanaise est connue depuis fort longtemps, mais dans cet article, la partie azerbaïdjanaise avance un nouveau thème de propagande suggérant que durant la période soviétique, les « scientifiques » azerbaïdjanais n’avaient pas la possibilité de mener des recherches sur le territoire du Karabakh en raison de «sérieux obstacles». Selon M. Pachayeva, les opportunités ont été récemment créées pour permettre « une étude objective sur l’héritage chrétien albanais ».

Le plus étonnant dans ces déclarations provenant de Bakou est que pendant la période soviétique, les « scientifiques » azerbaïdjanais n’auraient pas eu l’occasion d’étudier le patrimoine chrétien du Karabakh. Or, le Haut-Karabakh qui faisait partie de jure et de facto de l’Azerbaïdjan pendant la période soviétique était directement et indirectement contrôlé par le Bakou grâce à de multiples leviers administratifs, économiques, financiers et infrastructurels. Le plus léger désaccord avec les autorités de Bakou et cette politique aurait immédiatement provoqué des sanctions dans la région.

En réalité, durant la période soviétique, seuls les « scientifiques » azerbaïdjanais avaient le droit de mener des recherches sur le territoire historique de l’Artsakh et la plupart d’entre eux travaillaient sur des monuments qui n’avaient rien à voir avec l’héritage culturel chrétien.  De ce fait, dans les nombreux ouvrages scientifiques publiées par l’Académie des Sciences de la R.S.S. d’Azerbaïdjan durant ces années, les monuments historiques de l’Artsakh et le patrimoine chrétien n’étaient quasiment pas traités.

Seuls quelques « scientifiques » azéris se sont intéressés à l’histoire de l’Artsakh et se sont  occupé de réécrire l’histoire des provinces  d’Artsakh et d’Oudik en expurgeant tout ce qui était arménien. Cette politique de relecture et de diffusion de cette histoire très active à partir des années 1950 s’est plus encore développée dans les années 1960. Ces publications consacrées au patrimoine chrétien, à la culture et à l’histoire de l’Artsakh ont été réalisées par Ziya  Bunyadov, Davud Akhundov, Fuad Mamedov, Rachid Geyushev, Igrar Aliyev et quelques autres. Ces « scientifiques » azerbaïdjanais ont ainsi développé les bases « théoriques» de la déformation et de l’appropriation de l’histoire, de la culture et du patrimoine culturel de l’Artsakh avec pour objectif principal « l’albanisation » de l’Artsakh et de son patrimoine culturel. Seul Rachid Geyushev a participé à des recherches archéologiques sur le « patrimoine culturel chrétien du Karabakh ». Ce dernier a effectué des « fouilles » dans les monastère d’Amaras et de Kachatagh. Dans ses livres, il fait référence aux monastères de Gandzasar, de Dadivank et à quelques autres monuments, mais, en niant évidemment leur caractère arménien et en les présentant comme des monuments « albanais ».

Certains « scientifiques » azerbaïdjanais ont également tenté de traiter de la culture et des monuments de l’Artsakh. Parmi eux se trouvaient des gens comme Davud Akhundov, Rachid Geyushev, Niyazi Rzayev, Mubariz Khalilov. Dans leurs ouvrages, ceux-ci citaient des exemples et des photos de divers khatchkars du Haut-Karabakh. Cette circonstance suffit à elle seule à prouver qu’il n’existait alors aucun obstacle au travail des « scientifiques » azerbaïdjanais pendant la période soviétique.

Cependant, d’une manière plus générale, le patrimoine culturel de l’Artsakh suscitait alors peu d’intérêt et de ce fait peu de recherches ont été menées. C’est le meilleur indicateur qui atteste du fait que cela n’intéressait pas la plupart des chercheurs azerbaïdjanais. De plus, au cours de la même période, les autorités de l’Azerbaïdjan ont détruit de nombreuses églises et monastères dans les régions de Kelbadjar et de Latchine et des dizaines de khatchkars et de pierres tombales ont été brisés. Le tout sans aucune expression de réprobation de ces « scientifiques » azerbaïdjanais.

Pendant toutes les années du pouvoir soviétique, les autorités azerbaïdjanaises n’ont cessé de créer des entraves et des obstacles pour les seuls chercheurs arméniens, pour lesquels il était dangereux de travailler dans des régions désertiques comme celle de Karvadjar-Kachatagh. A cette époque, seuls des individus pouvaient étudier certains sites au Haut-Karabakh. On ne pouvait évidemment pas envisager de véritables « expéditions » ou « missions » arméniennes.

Durant la période soviétique, beaucoup de monuments du territoire du Haut-Karabakh n’étaient pas recensés et aucun document n’était établi. Les monuments chrétiens du Haut-Karabakh n’étaient pratiquement pas représentés dans les brochures touristiques de l’Azerbaïdjan soviétique et seuls les monuments islamiques de Chouchi figuraient sur la carte touristique de l’Azerbaïdjan soviétique.

L’article s’intéresse plus particulièrement aux « scientifiques » partisans de la «thèse albanienne » auxquels la partie arménienne n’aurait pas donné la possibilité de mener des recherches. Cette observation est pour le moins insolite. Qui sont ces scientifiques qui n’auraient pas été autorisés à travailler ?

Les déclarations de Rafik Tanakari, chef de la communauté religieuse « albanaise », comportent des idées très dangereuses. Notamment qu’à l’avenir certaines églises seront conservées, d’autres restaurées et d’autres encore fonctionneront en tant que musées.

En vertu de cela, il faut comprendre avec certitude que sous couvert de restauration, les inscriptions arméniennes, les compositions de croix, les khatchkars seront effacés, ce qui a été  réalisé lorsque la partie azerbaïdjanaise a tenté de « restaurer et de nettoyer » ces monuments pendant le période soviétique.

Parmi les monuments ramenés à « un aspect restauré et historique » se trouve l’église au sommet de la montagne Vankasar dont les inscriptions arméniennes, les croix gravées ont été effacées, où les khatchkars environnants ont disparu et l’un d’entre eux a été transporté au musée d’Aghdam après avoir été martelé. L’église a subi des modifications extérieures étrangères à l’architecture paléochrétienne.

Nous pouvons donc constater que la machine de propagande azerbaïdjanaise tente désormais de présenter ces « scientifiques » azerbaïdjanais comme des victimes auxquelles les Arméniens auraient interdit d’accéder aux régions de l’Artsakh pendant la période soviétique.

Traduction et adaptation : Sahak Sukiasyan

NDT: On notera avec intérêt que le 27 octobre, par le canal de la « Communauté de l’Azerbaïdjan occidental”, les autorités de Bakou ont attaqué sur ce thème avec une grande impudence la France dans le communiqué repris ci-dessous :

« Les déclarations ridicules des responsables français à propos de l’Azerbaïdjan ne surprennent plus personne. Cette fois, c’est la ministre française de la Culture qui a pris le relais. La ministre française a déclaré que son pays avait « photographié le patrimoine culturel arménien du Karabakh par satellite et créé une base de données de photos satellite ». Il semble que les connaissances de ces personnalités officielles françaises ignorantes sur le droit international, les relations interétatiques et la bonne conduite sont à un niveau élémentaire. Autrement, ils ne se livreraient pas à des pratiques aussi ignobles et racistes sans l’accord de l’État souverain … Cette déclaration de la France est une impudeur évidente. Cela vient du ministre d’un pays qui a volé le patrimoine culturel des peuples africains pendant des siècles. Selon certains rapports, la France aurait volé 90 000 exemplaires du patrimoine culturel seulement en Afrique. La ministre française de la Culture ferait mieux de se concentrer sur la restitution du patrimoine culturel que son pays a volé à l’Afrique. L’Azerbaïdjan n’a rien à apprendre des charlatans. En outre, au lieu de calomnier, la ministre française devrait commenter la destruction massive par l’Arménie des monuments culturels et historiques azerbaïdjanais tant en Arménie que dans les territoires azerbaïdjanais auparavant occupés. Après la Seconde guerre du Karabakh, les activités anti-azerbaïdjanaises de la France ont fait d’UNESCO un instrument de sa sale politique et ont gravement porté atteinte à l’indépendance de cette organisation. La France abuse de la présence du siège de l’UNESCO sur son territoire, politisant et discréditant cette organisation humanitaire. Nous pensons que tout cela nécessite le déménagement du siège de l’UNESCO hors de France ». https://azertag.az/fr/xeber/les_activites_anti_azerbaidjanaises_de_la_france_dans_le_domaine_culturel_necessitent_le_demenagement_du_siege_de_lunesco_hors_de_france-2804089

Madame Rima Abdul Malak appréciera …

Qu’attendent M. Macron et Mme Colonna pour convoquer « l’ambassadrice » de l’Azerbaïdjan au Quai d’Orsay avant de la renvoyer à Bakou ?

La France va-t-elle encore supporter longtemps le comportement de cette voyoucratie, de cet « Etat-parvenu » sur la scène internationale ?